Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/576

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— J’aime mieux qu’il l’épouse que moi, dit un autre ; il aura du beau, une paysanne sortie du bon chemin et à bout de vertu !

Karel frappa sur l’étau avec son poing convulsivement fermé, jeta à celui qui parlait un regard plein d’amertume et de colère, et dit d’une voix étouffée :

— Lisa ? Lisa est innocente et pure ! Vous parlez méchamment et injustement !

Après ce peu de mots, il regagna la route et s’éloigna à pas lents de la forge, sans prendre garde à ce que lui criait encore son ami Sus.

Il traversa la route et prit un sentier qui menait dans la campagne. Chemin faisant, il se parlait de temps en temps à lui-même, s’arrêtait parfois en frappant du pied, puis reprenait sa marche d’un pas plus rapide, et s’éloignait toujours davantage, lorsque y au coin d’une petite sapinière, il entendit soudain prononcer son nom.

Il vit le domestique de baes Gansendonck assis sur le talus de la sapinière, une bouteille dans une main, un morceau de viande dans l’autre, et un fusil de chasse à côté de lui.

— Ah ! Kobe, s’écria le jeune homme avec joie, que faites-vous ici ?

— C’est encore une lubie de notre baes, répondit le domestique. Dès qu’il peut se passer de moi, il faut me mettre en route et aller jouer au garde forestier. Je veille ici à ce que les arbres ne s’envolent pas.

— Faites quelques pas avec moi, dit Karel d’une voix suppliante.

— J’ai justement fini mon repas, dit le domestique en