Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/579

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Karel. Si J’étais vous, j’irais droit au but ; mieux vaut un carreau cassé que la maison perdue.

— Que voulez-vous dire ? pour l’amour de Dieu, parlez plus clairement.

— Eh bien, cherchez une querelle à monsieur Victor ; fallût-il se battre, cela amènerait encore un changement, et d’ordinaire, en changeant, ce qui ne vaut rien s’améliore.

— S’il me donnait seulement un prétexte ! s’écria Karel ; mais ce qu’il dit et fait est si habilement calculé, qu’il y a de quoi crever de dépit sans pouvoir se venger.

— Allons, allons, qui veut trouver n’a pas besoin de chercher bien loin. Marchez-lui sur le pied, vous savez bien, son petit pied en pantoufles de velours ! De cette manière, la partie sera bientôt en train.

— Ah ! Kobe, qu’en dirait Lisa ? Faut-il que je compromette sa réputation par une agression qu’on regarderait comme une preuve que moi aussi j’ai de mauvaises idées sur son compte ?

— Pauvre innocent ! croyez-vous que les gens ne glosent pas sur Lisa ? Il n’y a pas de mal qu’on ne dise d’elle tous les jours. Toute l’affaire est divulguée, et chacun y ajoute encore son petit mot.

— Mon Dieu ! mon Dieu ! elle est innocente, et on l’accuse comme une coupable !

— Karel, vous n’avez plus de sang dans le cœur. Vous voyez le mal grandir chaque jour, et vous courbez la tête comme un enfant impuissant. Vous voyez que tout concourt à pousser à sa perdition votre innocente amie : le langage séducteur de Victor, le fol orgueil de son