Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/580

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père, et sa propre inclination à elle pour tout ce qui vient de la ville. Personne ne peut rien faire pour la sauver, personne que vous… ange gardien qui vous endormez tandis que le démon travaille à égarer cette chère âme ! Grâce à votre craintive et débonnaire patience, vous abandonnez Lisa, seule en face du danger qui la menace ! Si, par malheur, elle succombait, à qui en serait la faute ? Allons, aidez-vous, Dieu vous aidera ; soyez courageux, tranchez le nœud, montrez-vous homme ! Le proverbe ne dit-il pas : C’est parce que le berger qui connaît le bon chemin s’en écarte, que le loup mange la brebis ?

Karel ne répondit qu’après un moment de silence.

— Hélas ! hélas ! dit-il en soupirant, j’ai peur de tout ! Que pourrais-je entreprendre ? Je sais qu’au premier regard de Lisa la dernière étincelle de courage s’éteindra en moi : le cœur est malade, Kobe ; il faut subir mon triste sort.

— Défendez-la au moins contre les sanglants outrages du baron lui-même.

— Les outrages ? L’a-t-il outragée ?

— Savez-vous ce que monsieur Van Bruinkasteel disait avant-hier en se raillant à ses compagnons, en présence du chasseur d’Adolphe ?

Il s’approcha mystérieusement du brasseur, et lui dit quelques mots à l’oreille.

— Tu mens ! tu mens ! s’écria Karel en repoussant violemment le domestique ; il n’a pas dit cela !

— Comme vous voudrez, Karel, grommela Kobe, Soit ! je mens, le chasseur ment ; cela n’est pas vrai, cela