Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/586

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

larmes. Son regard était si suppliant, si aimant ; elle l’appelait de si doux noms, que, vaincu et à bout de forces, il s’adossa sur la chaise et dit avec un profond soupir :

— Oh ! merci, merci, Lisa : vous m’avez sauvé ! Sans vous, c’en était fait !

La jeune fille pressait ses deux mains et continuait à le calmer et à le consoler par d’affectueuses paroles. Elle voyait bien, à la violente émotion qui l’agitait encore, que sa colère n’était pas éteinte, et s’efforçait d’apprendre de lui la cause de son égarement.

Sur ces entrefaites, le baron s’approcha de la porte, et il se disposait à quitter l’auberge ; mais baes Gansendonck lui cria :

— Eh bien, monsieur le baron, avez-vous peur d’un paysan fou ?

— Je ne crains pas un paysan fou, répondit le baron en ouvrant la porte, mais il ne me convient pas de me prendre au collet avec lui.

À ces insultantes paroles, Karel bondit, s’arracha des bras de son amie, et courut à la porte pour rejoindre le baron dehors ; mais baes Gansendonck l’arrêta et s’écria transporté de colère :

— Holà ! maraud, à nous deux maintenait ! Cela dure depuis assez longtemps. Quoi ! tu viendras chasser les gens de ma maison et y jouer le rôle de baes ! Frapper à coups de chaise monsieur le baron Van Bruinkasteel ! Je ne sais ce qui me retient de te faire empoigner par les gendarmes ! Viens, j’ai à te dire des choses que ma fille ne doit pas entendre : comme cela, ce sera