Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/598

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— Vraiment ?

— Oui, et qu’elle demeurera fille toute sa vie si elle n’a ce maraud de Karel pour mari. Elle serait belle dans la sale brasserie, assise à un rouet auprès de la marmite aux vaches ! Et quand elle voudrait aller en ville, elle pourrait grimper sur la charrette à bière, n’est-ce pas, Kobe ?

— Oui, baes.

— Allons, donne-moi mes gants ; je suis prêt. Voyons un peu ce que fait Lisa ; peut-être va-t-elle encore nous régaler de quelque nouveau caprice. Hier soir du moins elle ne voulait pas entendre raison sur les six volants de sa robe neuve. Bon gré, mal gré, elle s’habillera comme je le juge convenable.

Lisa était assise dans la chambre de devant, auprès de la fenêtre. Une profonde tristesse était empreinte sur son visage, elle tenait une aiguille d’une main et de l’autre un ouvrage de broderie, mais ses pensées étaient bien loin, car elle restait immobile et ne travaillait pas.

— Qu’est-ce que c’est que cela ? s’écria baes Gansendonck avec colère ; je suis babillé de la tête aux pieds, et tu es encore là comme s’il ne s’agissait de rien.

— Je suis prête, mon père, répondit Lisa avec une patiente résignation.

— Mon père ! mon père ! Tu veux donc encore me faire sortir de ma peau ?

— Je suis prête, papa, répéta la jeune fille.

— Lève-toi un peu, dit baes Gansendonck avec une mine rébarbative ; quelle robe as-tu là ?

— Ma robe des dimanches, papa.