Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/605

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avec soin, et formaient par leur réunion cette voûte verdoyante. Bien que les derniers rayons du soleil éclairassent encore un côté de cette allée, et semant de points lumineux les feuilles transparentes, les fissent se détacher sur le fond d’un vert plus foncé, il y faisait néanmoins très-sombre.

Le jeune homme traversa l’allée, et s’approcha de la maison, du côté de la salle où se trouvaient le baron et ses convives.

À trois ou quatre pas d’une fenêtre de ce salon s’élevait un massif de seringats dont à coup sûr les fleurs devaient au printemps remplir toute la maison de leur doux parfum. Karel se blottit dans cette retraite, d’où son regard pénétrait directement et sans obstacle dans le salon.

Ah ! comme son cœur battait, comme le sang lui bondissait à la tête ! Il pouvait tout voir, tout entendre, car le vin et la joie avaient haussé les voix.

Il lui sembla qu’on voulait forcer Lisa à faire quelque chose contre son gré. Le baron l’attirait par la main vers le piano avec une douce violence ; son père la poussait avec moins d’égards, et s’écriait à demi fâché :

— Lisa, Lisa, tu vas encore une fois me faire sortir de ma peau avec ton entêtement ! Vas-tu recommencer comme ce matin ? Ces messieurs te prient avec tant d’amabilité de chanter une fois encore cette petite chanson, et tu es assez malhonnête pour refuser ! Il ne faut pas cacher ta voix, fillette, mais bien la faire entendre.

Le baron insista de nouveau ; le baes ordonna avec