Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/616

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— Les eaux tranquilles sont les plus profondes, baes.

— Allons, parle, mais pas trop longtemps. Et surtout n’oublie pas que je ne paie pas mon domestique pour en recevoir des leçons.

— Il y a un proverbe, baes, qui dit : Le sage va consulter le fou, et y trouve la vérité.

— Eh bien, dis-moi ce que le fou a à conseiller au sage. Si tu veux parler raisonnablement, je t’écouterai bien un peu.

Le domestique se tourna avec sa chaise vers son maître, et dit d’un ton net et résolu :

— Baes, il se passe ici depuis deux mois des choses que même un lourd domestique ne peut voir sans que parfois le sang lui bouille d’impatience.

— Je le crois bien, mais cela ne durera pas longtemps ; les gendarmes ne sont pas payés pour attraper des mouches.

— Quant à ce qui me regarde, baes, je suis paresseux, je l’avoue ; mais pourtant le cœur est encore bon. Je ferais beaucoup pour sauver notre brave Lisa du malheur si cela était en mon pouvoir ; et je n’oublie pas non plus, baes, que, malgré vos emportements, vous êtes au fond bon pour moi.

— C’est vrai, Kobe, dit le baes ému, j’entends avec plaisir que tu es reconnaissant envers moi ; mais où veux-tu en venir avec ce ton sérieux ?

— Ne me faites pas atteler le chariot devant les chevaux, baes : je toucherai assez tôt la corde sensible.

— Sois court ou je me sauve ; tu me feras mourir à barguigner ainsi !