Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/623

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bouillie tombe à terre. Il faut que vous sachiez aujourd’hui même ce que le baron porte dans sa manche.

— Allons, allons, s’écria le baes, j’irai cette après-dînée au pavillon de chasse : je demanderai au baron qu’il s’explique nettement ; mais je sais d’avance ce qu’il va répondre.

— Je désirerais bien que vous pussiez dire vrai, baes ; mais je crains bien que vous ne soyez mal étrenné.

— Comment ? que je pusse dire la vérité ?

— Ou que vous disiez vrai cette fois-ci.

— C’est le monde renversé, soupira le baes avec une douloureuse impatience ; le domestique fait la leçon au maître… et il faut que j’avale cela ! Jouez avec un âne, il vous sangle le visage de sa queue. Mais attends un peu, je serai bientôt vengé ; dès cette après-dînée, je vais au pavillon ; et que diras-tu, insolent maraud, quand je reviendrai avec la déclaration du baron qu’il entend épouser Lisa ?

— Que vous avez seul du bon sens, baes, et que tous les autres, moi compris, sont de grands imbéciles. Mais que direz-vous, baes, si monsieur Van Bruinkasteel se moque de vous ?

— Cela ne se peut, te dis-je !

— Oui, mais enfin si cela était ?

— Si ! si ! si le ciel tombait nous serions tous morts.

— Je répète ma question, baes : si le baron vous éconduit en se moquant de vous ?

— Ah ! baron ou non, je lui montrerai qui je suis, et…

Un affreux cri de détresse, un cri perçant d’angoisse arrêta la parole sur ses lèvres.