Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/635

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attendre ! Ce n’est pas là une affaire pour rire et je ne sais si une comtesse offre toujours autant d’avantages. Une bonne occasion s’envole comme les cigognes sur la mer, et Dieu sait quand elle revient.

— Pauvre Gansendonck, dit le baron, je vous plains ; vous n’avez vraiment pas vos cinq sens ; il y a quelque chose de détraqué dans votre cerveau.

— Comment ? comment ? s’écria le baes avec irritation. Mais je me contiendrai ; c’est peut-être pour rire. Il faut cependant que notre malentendu ait une fin. Je pose nettement la question, monsieur Van Bruinkasteel : voulez-vous épouser ma fille, oui ou non ? Je vous en prie, donnez-moi une réponse claire et nette.

— Il m’est aussi possible d’épouser Lisa, baes, qu’à vous d’épouser l’étoile du berger.

— Et pourquoi cela ? s’écria le baes en colère ; seriez-vous donc trop fier pour vouloir de nous ? Les Gansendonck sont des gens honorables, monsieur, et ils ont mainte belle pièce de terre sous le ciel bleu ! Bref, épousez-vous ma fille, oui ou non ?

— Votre demande est ridicule : cependant je veux bien y répondre. Non, je n’épouserai pas Lisa, ni aujourd’hui, ni demain, ni jamais ! Et laissez-moi en paix avec vos folles lubies.

Tremblant de rage et rouge comme un coq, de honte et de dépit, le baes frappa violemment du pied sur le tapis ; et s’éprit :

— Ah ! ma demande est ridicule ! je suis un fou ! vous ne voulez pas épouser Lisa ! Nous verrons ça ! La loi est là pour tout le monde, aussi bien pour moi que pour un