Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/640

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sans, parlez et agissez comme les gens de votre condition, cherchez à votre fille un brave fils de laboureur pour mari, fumez votre pipe et buvez votre pinte de bière amicalement avec les gens du village, et ne vous efforcez plus de paraître ce que vous n’êtes pas. Songez que lorsque l’âne porte la peau du lion, ses oreilles dépassent toujours, et qu’on ne manquera jamais de s’apercevoir à votre plumage et à votre ramage que votre père n’était pas un rossignol. Et maintenant allez en paix avec cette leçon ; vous m’en remercierez plus tard ! Pensez-vous avoir encore quelque chose à dire ? parlez, je vous écouterai à mon tour.

Le baes bondit de nouveau de sa chaise, croisa comme un furieux les bras sur sa poitrine, et s’écria :

— Ah ! vous croyez me tromper par votre feinte modération et vos singeries ? Non, non, ça ne se passera pas ainsi ; nous verrons s’il n’y a pas de loi pour vous contraindre, monsieur le baron ! J’irai trouver votre père à la ville, et lui exposer comment vous avez souillé l’honneur de ma maison ! Et dussé-je faire écrire à Paris à la comtesse dont vous me cachez le nom par crainte, je le ferai ; — j’empêcherai votre mariage, et de plus, je ferai connaître à tout le monde quel faux trompeur vous êtes !

— Est-ce tout ce que vous avez à dire ? demanda le baron avec une colère contenue.

— Épousez-vous Lisa, oui ou non ? vociféra le baes en le menaçant du poing.

Le baron étendit la main et tira deux fois violemment le cordon de la sonnette. On entendit aussitôt des pas