Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/648

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si ce n’était ta maladie qui l’afflige, il s’estimerait heureux en ce monde.

— Il a tant souffert, père ; vous l’aimerez, n’est-ce pas ? Vous ne le repousserez plus ? Il est si bon !

— Le repousser ! s’écria le baes d’une voix tremblante ; je l’ai supplié à genoux de me pardonner, j’ai baigné ses pieds de mes larmes…

— Ciel ! Et lui, père ?

— Il m’a serré dans ses bras, m’a embrassé, m’a consolé. J’ai voulu m’accuser moi-même, lui dire que mon orgueil seul est la cause de son malheur, lui promettre que toute ma vie serait une expiation. Il m’a fermé la bouche par un baiser… un baiser qui comme un baume du ciel a versé dans mon cœur l’espérance et l’énergie, et m’a donné la force d’attendre avec moins d’anxiété la décision de Dieu. Béni soit le cœur généreux qui rend le bien pour le mal !

— Et à moi aussi il a tout pardonné, n’est-ce pas, père ?

— Te pardonner, Lisa ? Quel mal as-tu donc jamais fait ! Ah ! si tu souffres, si une punition d’en haut semble te frapper, c’est pour moi seul, ma pauvre enfant, que tu supportes cette amère expiation !

— Et moi, suis-je innocente, père ? N’est-ce pas ma légèreté qui déchirait le cœur de Karel et le faisait languir de désespoir ? Mais il m’a tout pardonné, l’excellent ami.

— Non, non, s’écria le père, Karel n’a rien à te pardonner. Tu conserves toujours à ses yeux la chaste pureté de la fleur du lis… Même alors que mon orgueil