Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/653

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Et, en effet, c’était Karel le brasseur, qu’une réduction de peine venait de rendre inopinément à la liberté.

Maintenant il revenait au village, le cœur plein de rêves heureux. Il allait revoir sa Lisa, la consoler, la guérir ! Car n’était-ce pas sa condamnation, son emprisonnement, qui courbaient la jeune fille sous le poids d’un chagrin rongeur et la faisaient dépérir ? Et sa délivrance, son retour, n’étaient-ils pas l’infaillible remède à sa maladie ? Oh oui, il allait la retrouver, pure, aimante ; la surprendre par son apparition imprévue, lui crier : — Cesse de t’abandonner à ta douleur, ma Lisa. Me voici, moi, ton fidèle ami. Puise des forces dans mon amour, relève la tête avec espoir ; tous nos maux sont passés, envisage l’avenir avec courage et joie, souris à la vie : elle nous promet encore tant de belles années !

Et sa bonne vieille mère ! Comme il allait la récompenser de ses tendres et sympathiques souffrances ! Déjà il la voyait en esprit, poussant un cri d’émotion, accourir au-devant de lui ; il sentait ses bras s’enlacer à son cou, ses baisers brûler ses joues, ses larmes couler sur son front… Et il souriait avec amour à la douce vision, tandis que le mot : Mère ! mère ! tombait de ses lèvres.

Oh ! le jeune homme était heureux ! Sa liberté retrouvée gonflait de joie sa puissante poitrine ; l’atmosphère parfumée de la bruyère l’enveloppait de balsamiques effluves et versait le feu de la vie dans ses poumons ; le soleil de printemps jetait des teintes dorées sur la fraîche et jeune verdure des sapins, et donnait à la nature entière un magnifique vêtement de fête. Rêvant un séduisant avenir, le cœur débordant de reconnaissance envers