Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/654

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Dieu, évoquant sous ses yeux fascinés tout ce qu’il aimait, soupirant d’amour, souriant de bonheur, le jeune homme marcha d’un pas de plus en plus rapide jusqu’à une demi-lieue environ de son village natal.

Là il s’arrêta soudain, tremblant et comme si une lugubre apparition l’eût frappé d’effroi et de consternation.

Trois messieurs venaient de déboucher d’un chemin latéral sur la chaussée ; l’un d’eux était monsieur Van Bruinkasteel !

Il serait difficile de dire si ces personnes avaient remarqué le jeune homme ; mais du moins elles ne le regardèrent pas, et suivirent le chemin du village.

Karel était désolé. Il ne voulait pas en ce moment entrer en conversation avec le baron, car il sentait bouillir son sang et comprenait combien la rencontre pouvait être dangereuse pour lui si son ennemi lui adressait une seule parole insultante. Et cependant il ne pouvait s’arrêter non plus ; trop forte était l’impatience qui l’emportait vers sa bien-aimée Lisa, pour aller ensuite presser dans ses bras sa vieille mère.

Après un instant de réflexion, Karel prit une résolution subite ; il s’élança de la chaussée dans un sentier qui touchait celle-ci, et, courant à travers champs et bois, atteignit un autre chemin qui, bien qu’en faisant un long détour, devait aussi le conduire au village…

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Sur le village planait les sons lents du glas des morts… Dans le cimetière s’ouvre béante une tombe