Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/83

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rayonnait dans leurs yeux, et leurs cœurs battaient émus par un ineffable bonheur.

L’oncle souriant menaça son neveu du doigt, comme s’il voulait dire : « Je vois bien de quoi il s’agit ! »

Ce signe d’intelligence fit rougir encore davantage le jeune homme, bien que l’assentiment apparent de son oncle lui donnât la plus douce espérance. Lénora ne s’était heureusement pas aperçue de la plaisanterie.

On se mit à table ; le gentilhomme se plaça vis-à-vis de monsieur Denecker à côté de Gustave, qui, lui, se, trouva en face de Lénora.

La fermière apportait les plats ; son fils servait les convives. Les mets étaient passablement bien préparés, et le négociant en témoigna à plusieurs reprises sa satisfaction. À part lui, il s’étonnait du bon choix et même de l’abondance des mets ; car il s’était attendu à un très-maigre festin : monsieur de Vlierbecke n’était-il pas connu partout aux environs comme un riche ladre, d’une avarice et d’une économie sans exemple ?

Cependant, la conversation était devenue générale ; Lénora, ayant eu maintes fois à répondre à quelque question de sa compétence que lui faisait le négociant, se trouva plus à son aise et surprit beaucoup ses deux auditeurs par la haute raison et les connaissances dont elle fit preuve. Il en était autrement lorsqu’il lui fallait s’adresser directement à Gustave ; alors tout son esprit semblait l’abandonner, et c’était les yeux baissés qu’elle lui donnait une réponse hésitante et incompréhensible. Le jeune homme ne se montrait guère mieux, et quoique tous deux fussent heureux au fond du cœur, ils se trou-