Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/89

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— Cela ne me plaît pas moins qu’à vous, dit le négociant ; ma voiture vient à cinq heures. Je dois me rendre en ville avec mon neveu, et j’ai failli partir d’ici sans voir votre jardin. Faisons un tour de promenade ; tout à l’heure, pour finir, nous boirons une bonne bouteille à notre amitié.

En disant ces mots, il offrit le bras à Lénora, qui l’accepta gaiement. Bien que monsieur Denecker lançât à son neveu des regards railleurs, le jeune homme n’était pas mécontent au fond de voir son oncle témoigner tant d’affection à la jeune fille.

La promenade commença. On parla d’agriculture, de défrichement des bruyères, de chasse, et de mille autres choses. Lénora, en plein air et au bras du négociant, avait recouvré sa liberté d’esprit. La gaieté naturelle de son caractère se révéla unie au charme indicible d’une virginale ingénuité. Comme une biche folâtre, elle voulut forcer le négociant à courir ; elle sautillait à son côté avec toutes sortes d’exclamations de bonheur et de joie. Monsieur Denecker s’amusait infiniment des saillies étourdies de la jeune fille, et il faillit se laisser persuader de danser et de jouer avec elle. Il ne pouvait assez admirer ce ravissant visage tout rayonnant de bonheur, et se disait à lui-même, le sourire sur les lèvres, que l’avenir ne gardait pas de trop mauvais jours à son neveu.

Mais tandis que le gentilhomme était occupé à disserter avec son hôte et dessinait un croquis sur le sable, Lénora et Gustave avaient pris l’avance et semblaient s’entretenir fort sérieusement.