Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/97

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fût à peu près certain que son oncle ne se prononcerait pas contre son inclination, il prévoyait cependant qu’il ne lui permettrait plus de passer autant de temps en dehors des affaires commerciales. La pensée d’être séparé de Lénora pendant des semaines peut-être lui faisait envisager avec anxiété et tristesse le retour de son oncle.

Un jour, il exprimait ses craintes devant Lénora avec une profonde mélancolie et dépeignait la douleur qui remplirait son cœur en son absence. Pour la première fois, il vit couler des larmes des yeux de la jeune fille. Il fut tellement touché de cette preuve d’intime affection, qu’il prit silencieusement la main de Lénora et demeura longtemps assis à côté d’elle sans prononcer une parole. Pendant ce temps, monsieur de Vlierbecke s’efforçait de le réconforter ; mais ses paroles ne parurent pas atteindre le but désiré. Cependant, après s’être longtemps désolé, Gustave se leva tout à coup et prit congé de Lénora, quoique l’heure ordinaire de son départ n’eût pas sonné. La jeune fille lut sur son visage qu’une révolution venait de se produire dans son âme et vit son regard étinceler de courage et de joie ; elle s’efforça de le retenir et d’obtenir l’explication de cette joie subite ; mais il se refusa doucement à satisfaire sa demande, dit que le lendemain seulement elle connaîtrait son secret, et quitta le Grinselhof à pas précipités, comme s’il eût été poursuivi par une pensée qui l’obsédait.

Monsieur de Vlierbecke crut avoir lu dans les yeux du jeune homme ce qui s’était passé dans son cœur. Cette nuit-là, de beaux rêves adoucirent son sommeil.

Le lendemain, lorsque fut venue l’heure où Gustave