délits qui appellent sur les ministres la responsabilité, que par les mots très-vagues de high crimes and misdemeanours, mots qui ne précisent ni le degré ni la nature du crime.
On croira peut-être que c’est placer les ministres dans une situation bien défavorable et bien périlleuse. Tandis qu’on exige, pour les simples citoyens, la sauvegarde de la précision la plus exacte et la garantie de la lettre de la loi, les ministres sont livrés à une sorte d’arbitraire exercé sur eux, et par leurs accusateurs et par leurs juges. Mais cet arbitraire est dans l’essence de la chose même ; ses inconvénients doivent être adoucis par la solennité des formes, le caractère auguste des juges et la modération des peines. Mais le principe doit être posé : et il vaut toujours mieux avouer en théorie ce qui ne peut être évité dans la pratique.
Un ministre peut faire tant de mal sans s’écarter de la lettre d’aucune loi positive, que si vous ne préparez pas des moyens constitutionnels de réprimer ce mal et de punir ou d’éloigner le coupable (car il s’agit beaucoup plus d’enlever le pouvoir aux ministres prévaricateurs, que de les punir), la nécessité fera trouver ces moyens hors de la constitution même. Les hommes réduits à chicaner sur les termes, ou à enfreindre les formes, deviendront haineux, perfides et violents. Ne voyant point de route tracée, ils s’en fraieront une qui sera plus courte, mais aussi plus désordonnée et plus dangereuse. Il y a, dans la réalité, une force qu’aucune adresse n’élude longtemps. Si en ne dirigeant contre les ministres que des lois précises, qui n’atteignent jamais l’ensemble de leurs actes et la tendance de leur administration, vous les dérobez de fait à toutes les lois, on ne les jugera plus d’après vos dispositions minutieuses et inapplicables : on sévira contre eux d’après les