Page:Contes des Fées, par Perrault, Mme D’Aulnoy, Hamilton et Mme Leprince de Beaumont, 1872.djvu/278

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
254
MADAME D’AULNOY.

il vit un chariot découvert, traîné par six licornes ; il brillait d’or et de pierreries, plusieurs instruments de guerre le précédaient. Une reine, en manteau royal et couronnée, était assise sur des carreaux de drap d’or, qui tenait devant elle son fils âgé de quatre ans.


Babiole et le valet de chambre à l'arrivée de la reine


Le valet de chambre reconnut cette reine ; car c’était la sœur de sa maîtresse ; elle l’était venue voir pour se réjouir avec elle ; mais aussitôt qu’elle sut que la petite princesse était morte, elle partit fort triste pour retourner dans son royaume. Elle rêvait profondément lorsque son fils cria : « Je veux la guenon ! je veux l’avoir ! » La reine ayant regardé, elle aperçut la plus jolie guenuche qui ait jamais été. Le valet de chambre cherchait un moyen de s’enfuir ; on l’en empêcha. La reine lui en fit donner une grosse somme, et, la trouvant douce et mignonne, elle la nomma Babiole. Ainsi, malgré la rigueur de son sort, elle tomba entre les mains de la reine sa tante.

Quand elle fut arrivée dans ses États, le petit prince la pria de lui donner Babiole pour jouer avec lui. Il voulait qu’elle fût habillée comme une princesse ; on lui faisait tous les jours des robes neuves, et on lui apprenait à ne marcher que sur les pieds. Il était impossible de trouver une guenon plus belle et de meilleur air : son petit visage était noir comme jais, avec une barbette blanche, et des touffes incarnates aux oreilles, ses menottes n’étaient pas plus grandes que les ailes d’un papillon, et la vivacité de ses yeux marquait tant d’esprit, que l’on n’avait pas lieu de s’étonner de tout ce qu’on lui voyait faire.

Le prince, qui l’aimait beaucoup, la caressait sans cesse ; elle se gardait bien de le mordre, et quand il pleurait, elle pleurait aussi. Il y