Page:Contes des Fées, par Perrault, Mme D’Aulnoy, Hamilton et Mme Leprince de Beaumont, 1872.djvu/435

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et toutes ses actions avaient un air si honnête ; qu’on ne pouvait s’empêcher de l’admirer et de le chérir. Il ne disait rien qui ne fît plaisir à entendre et la foule était si grande autour de lui, qu’il ne savait à quoi attribuer une chose si extraordinaire ; car ayant toujours été à la campagne, il avait vu très peu de monde.

Il continua son chemin sur son excellent cheval, qui l’entretenait agréablement de mille nouvelles, ou de ce qu’il y avait de plus remarquable dans les histoires anciennes et modernes. Mon cher maître, disait-il, je suis ravi d’être à vous, je connais que vous avez beaucoup de franchise et d’honneur, je suis rebuté de certaines gens avec lesquels j’ai vécu longtemps ; et qui me faisaient haïr la vie, tant leur société m’était insupportable. Il y avait entre autres un homme qui me faisait mille amitiés, qui m’élevait au-dessus de Pégase et de Bucéphale, lorsqu’il parlait devant moi ; mais aussitôt qu’il ne me voyait plus, il me traitait de rosse et de mazette ; il affectait de me louer sur mes défauts pour me donner lieu d’en contracter de plus grands. Il est vrai qu’étant un jour fatigué de ses caresses, qui étaient à proprement parler des trahisons, je lui donnai un si terrible coup de pied ; que j’eus le plaisir de lui casser presque toutes les dents, et je ne le vois jamais depuis que je ne lui dise avec beaucoup de sincérité : il n’est pas juste une bouche qui s’ouvre si souvent pour déchirer ceux qui ne vous font aucun chagrin, soit aussi agréable que celle d’un autre. Ho, ho ! s’écria le chevalier, tu es bien vif ; ne craignais-tu point que cet homme en colère ne te passât son épée au travers du corps ? Il n’importe pas, seigneur, reprit Camarade et puis j’aurais su son dessein, dès qu’il l’avait formé.

Ils parlaient ainsi, lorsqu’ils arrivèrent dans une vaste forêt. Camarade dit au chevalier mon maître, il y a ici un homme qui nous peut être d’une grande utilité, c’est un bûcheron ; il a été doué. Qu’entends-tu par ce terme, interrompit Fortuné ? Doué, veut dire qu’il a reçu un ou plusieurs dons de fées, ajouta le cheval, il faut que vous l’engagiez à venir avec vous. En même temps, il fut dans l’endroit où le bûcheron travaillait. Le jeune chevalier s’approcha d’un air doux et insinuant et lui fit plusieurs questions sur le lieu où ils étaient ; s’il y avait des bêtes sauvages dans la forêt, et s’il était permis de chasser. Le bûcheron répondit en homme de bon sens. Fortuné lui demanda encore où étaient allés ceux qui l’avaient aidé à jeter tant d’arbres par terre : le bûcheron dit qu’il les avait abattus tout seul, que c’était l’ouvrage de quelques heures, et qu’il fallait qu’il en abattît bien d’autres