Page:Contes des Fées, par Perrault, Mme D’Aulnoy, Hamilton et Mme Leprince de Beaumont, 1872.djvu/462

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trois fois, la princesse attendait bonnement que Léger s’éveillât. Elle pensa enfin qu’il lui était d’une grande conséquence de tirer son père de l’embarras où il était, de sorte qu’elle partit avec une grâce et une légèreté merveilleuse. Comme Fortuné se tenait au bout de l’allée avec tous ses gens, il ne savait rien de ce qui se passait ; lorsqu’il vit la princesse, qui courait toute seule, et qui n’était plus guère qu’à une demi-lieue du but : « Dieux ! s’écria-t-il, en parlant à son cheval, nous sommes perdus ; je n’aperçois point Léger ! — Seigneur, dit Camarade, il faut que Fine-Oreille écoute, peut-être il nous apprendra ce qu’il fait. » Fine-Oreille se jeta par terre, et bien qu’il fût à deux lieues de Léger, il l’entendit ronfler. « Vraiment, dit-il, il n’a garde de venir, il dort comme s’il était dans son lit. — Eh ! que ferons-nous donc, s’écria encore Fortuné ? — Mon maître, dit Camarade, il faut que Bon-Tireur lui décoche une flèche dans le petit bout de l’oreille afin de le réveiller. » Le Bon-Tireur prit son arc, et frappa si juste, qu’il perça l’oreille de Léger. La douleur qu’il ressentit le tira de son assoupissement ; il ouvrit les yeux, il aperçut la princesse qui touchait presque au but, et il n’entendit derrière lui que des cris de joie et d’applaudissement. Il s’étonna d’abord ; mais il regagna bien vite ce que le sommeil lui avait fait perdre. Il semblait que les vents le portaient, et que les yeux ne le pouvaient suivre ; enfin il arriva le premier, ayant encore la flèche dans l’oreille, car il ne s’était pas donné le temps de l’ôter.

L’empereur demeura si surpris des trois événements qui s’étaient