Page:Contes des Fées, par Perrault, Mme D’Aulnoy, Hamilton et Mme Leprince de Beaumont, 1872.djvu/463

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passés depuis l’arrivée de l’ambassadeur, qu’il crut que les dieux s’intéressaient pour lui, et qu’il ne pouvait plus différer de tenir sa parole. Approchez, lui dit-il, afin d’entendre par ma bouche, que je consens que vous preniez ici ce que vous ou l’un de vos hommes, pourrez emporter des trésors de votre maître ; car il ne faut pas que vous pensiez que je veuille jamais vous en donner davantage, ni que je laisse aller ses soldats, ses sujets et ses chevaux. L’ambassadeur lui fit une profonde révérence ; il lui dit qu’il lui faisait encore beaucoup de grâce, et qu’il le suppliait de donner ses ordres là-dessus,

Matapa tout plein de dépit parla au gardien de ses trésors, et s’en alla à une maison de plaisance qu’il avait près de la ville. Aussitôt Fortuné et ses gens demandèrent l’entrée de tous les lieux où les meubles, les raretés et l’argent et les bijoux du roi étaient enfermés On ne lui cacha rien mais ce fut à condition qu’il n’y aurait qu’un seul homme qui pourrait s’en charger, Forte-Échine se présenta, et avec son secours l’ambassadeur emporta tous les meubles qui étaient dans les palais de l’empereur, cinq cent statues d’or plus hautes que des géants, des carrosses, des chariots, et toutes sortes de choses, sans exception ; avec cela Forte-Echine marchait si légèrement, qu’il ne semblait pas qu’il eût une livre pesant sur son dos.

Lorsque les ministres de l’empereur virent que ses palais étaient démeublés à tel point qu’il n’y restait ni chaises, ni coffre, ni marmite, ni lit pour se coucher, ils allèrent en diligence l’en avertir, et l’on peut juger de son étonnement, quand il sut qu’un seul homme emportait tout : il s’écria qu’il ne le souffrirait pas, et commanda à ses gardes et à ses mousquetaires de monter à cheval, et de suivre en diligence les ravisseurs de ses trésors. Bien que Fortuné fût à plus de dix lieues, Fine-Oreille l’avertit qu’il entendait un gros de cavalerie qui venait à toute bride, et le bon Tireur, qui avait la vue excellente, les aperçut ; ils étaient au bord d’une rivière. Fortuné dit à Trinquet : nous n’avons point de bateau, si tu pouvais boire une partie de cette eau, nous passerions. Trinquet aussitôt fit son devoir. L’ambassadeur voulait profiter du temps pour s’éloigner ; son cheval lui dit : ne vous inquiétez pas, laissez approcher nos ennemis. Ils parurent au bord de la rivière, et sachant où les pêcheurs mettaient leurs bateaux, ils s’embarquèrent promptement, et ramaient de toutes leurs forces, lorsque l’Impétueux enfla ses joues, et commença de souffler ; la rivière s’agita ; les bateaux furent renversés, et la petite