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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/107

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CONTES SECRETS RUSSES

clésiastique : « Pourquoi, père Mikhaïl, ne t’es-tu pas mis à table avec nous ? — Je n’ai pas faim, » répondit le pope. On alla se coucher. Le paysan conduisit ses hôtes à la skotnaïa[1], parce qu’il y faisait plus chaud que dans l’izba. Le pope se coucha sur le poêle, et le Cosaque dans la soupente. Vanka s’endormit tout de suite ; quant au pope, il aurait bien voulu trouver quelque chose à manger, mais il n’y avait rien dans la skotnaïa, sauf une huche contenant de la pâte. Il éveilla le Cosaque. « Qu’est-ce qu’il te faut, batouchka ? — Cosaque, j’ai faim ! — Eh bien ! pourquoi ne manges-tu pas ? Il y a, dans la huche, le même pain que sur la table, » répondit Vanka ; puis il descendit de la soupente et inclina la huche en disant : « Tu as là de quoi te rassasier. » Le pope se mit à laper la pâte, mais Vanka poussa la huche comme par mégarde et en répandit le contenu sur son maître. Celui-ci, ayant satisfait sa faim, se recoucha et ne tarda pas à s’endormir.

Sur ces entrefaites, une vache vêla dans l’étable ; aux cris de l’animal, la maîtresse de la maison accourut ; elle prit le veau, le porta à la skotnaïa et le mit sur le poêle à côté du pope ; après quoi, elle se retira. La nuit, le pope s’éveilla en sentant une langue qui lui léchait le visage ; son premier soin

  1. Endroit où couche le bouvier et où on met, en hiver, les veaux et les animaux malades ; c’est aussi là qu’on trait les vaches.