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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/132

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CONTES SECRETS RUSSES

aucun résultat, lorsque la nuit les surprit. Où loger ? Ils s’approchèrent d’une maison habitée par une veuve, et demandèrent qu’on voulût bien les y recevoir. « Bonnes gens, » leur répondit la veuve, il y aura, cette nuit, une inondation chez moi ; vous risquez d’être noyés ! » Mais ils insistèrent tellement, qu’elle finit par leur accorder l’hospitalité. Il faut dire que l’amant de la veuve avait promis de venir la voir cette nuit-là. Les quatre hommes entrèrent dans l’izba, et chacun s’y installa de son mieux pour dormir. « Si, en effet, il allait y avoir une inondation ? » se dit le pope. En vue de cette éventualité, il prit une grande auge, la plaça sur une tablette et se mit dedans. « Que l’inondation se produise, » pensa-t-il, « l’auge flottera sur l’eau. » Le Tsigane se coucha sur le foyer du poêle, la tête dans les cendres ; le moujik s’étendit sur le banc qui était devant la table ; quant à l’ouvrier du pope, il prit place sur un escabeau, tout près de la fenêtre.

À peine couchés, les voyageurs fermèrent l’œil. Seul, l’ouvrier ne s’endormit pas ; il entendit quelqu’un s’approcher de la fenêtre, puis il perçut les mots : « Ouvre, mon âme ! » C’était le galant de la veuve qui venait la voir. L’ouvrier se leva, ouvrit et dit tout bas au visiteur : « Ah ! mon chéri, tu arrives mal à propos. J’ai maintenant des étrangers logés chez moi. Viens la nuit prochaine. — Eh bien ! chérie, » répondit l’amant, « penche-toi à la fenêtre, que je puisse du moins t’em-