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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/167

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CONTES SECRETS RUSSES

conta naïvement tout ce qui lui était arrivé. Dès qu’elle eut appris la rencontre de son mari avec le bourlak, la popadia éclata en reproches : « Ah ! vieux diable que tu es ! Pourquoi l’as-tu lâché ? Pourquoi ne l’as-tu pas ramené à la maison ? Ce n’est pas un bourlak, c’est mon frère ! Pour sûr, mes parents l’ont envoyé nous faire visite, et tu ne t’es pas douté de cela… Attelle vite le cheval et mets-toi à sa recherche ; autrement le pauvre homme va faire bien des pas inutiles, il est même dans le cas de retourner chez lui sans nous avoir vus. Ce cher frère, si je pouvais seulement le contempler une minute et lui demander des nouvelles de mes parents ! » Le pope attela son cheval et partit à la recherche du moujik ; l’ayant rejoint, il lui dit : « Écoute, brave homme ! Pourquoi m’as-tu caché que tu étais le frère de ma femme ? Quand je lui ai raconté ton exploit, elle t’a reconnu tout de suite et m’a ordonné de te ramener chez nous. » Le bourlak devina immédiatement le fin mot de l’histoire. — « Oui, » répondit-il, « c’est la vérité, je suis le frère de ta femme, mais toi, batouchka, je ne t’avais jamais vu auparavant, par conséquent je ne pouvais pas te reconnaître. » Le pope le prit par le bras et le fit monter dans sa charrette : « Assieds-toi, mon cher, assieds-toi ! Allons à la maison ! ma femme et moi, grâce à Dieu, nous vivons dans l’aisance et le bien-être, nous avons le moyen de te régaler. » Lorsque la charrette fut arrivée devant