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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/210

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CONTES SECRETS RUSSES

fortune du pot ; c’est fête chez moi aujourd’hui : notre vache a vêlé. » Là-dessus, il versa à la visiteuse un grand verre d’eau-de-vie qui fut suivi d’un second, puis d’un troisième. « Bois, matouchka, à la santé de notre veau. » Il ne resta bientôt plus de vodka. « Femme, » ordonna le moujik à son épouse, « va encore chercher une demi-bouteille au cabaret : aujourd’hui je veux rigoler. »

La paysanne courut au cabaret, et le moujik, voyant la femme du pope prise de boisson, lui témoigna le désir de faire l’amour avec elle. Cette demande fut d’abord repoussée avec énergie ; toutefois les instances réitérées du paysan finirent par triompher des refus de la visiteuse. « Je t’en prie, matouchka, » suppliait-il, « je n’ai encore jamais tâté d’une femme de pope. — Mais où nous cacherons-nous ? » observa-t-elle, « il y a ici un mendiant. — Cela ne fait rien ; libre à lui de regarder ! » répondit-il, puis il étendit la popadia sur le lit et se mit à la βαισερ sous les yeux du pope, qui contemplait cette scène en poussant de gros soupirs. Au moment où le moujik venait de finir son affaire avec l’épouse du batouchka, sa femme arriva avec l’eau-de-vie et on recommença à boire. Ensuite la visiteuse prit congé et retourna chez elle, le paysan se mit au lit avec sa femme, le prétendu mendiant se coucha sur un banc et feignit de dormir, mais il n’attendait que le moment propice pour s’esquiver. Le paysan, s’en étant aperçu, fit exprès de ronfler avec bruit ; alors le pope