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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/217

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CONTES SECRETS RUSSES

fait nuit. » Au chantre, elle donna rendez-vous vers minuit. Le moujik, qui s’était entendu avec sa femme, sortit de chez lui en emportant quantité de sacs, comme s’il voulait aller au marché de la ville. Le pope arriva chez sa belle, et il venait à peine de se déshabiller quand on frappa à la porte : le mari était de retour. Le pope se cacha tout au fond d’un coffre. Puis parut le diacre ; il chercha un refuge dans la même cachette et se coucha sur le pope ; après eux se montra le chantre, qui se fourra aussi dans le coffre, où il prit place au-dessus du diacre. « Femme, » cria le moujik, « donne-moi mon fusil, je veux m’exercer au tir, fais une cible avec de la craie, tiens, sur ce coffre. » La femme se mit en devoir d’obéir. « Fais-la plus haut ! » lui dit tout bas le pope. — « Fais-la plus bas ! » supplia à son tour le chantre. Après les avoir bien effrayés, le paysan ordonna à sa femme de leur rendre la liberté, mais lui-même, armé d’un gourdin, se posta sur le seuil et, au passage, les rossa d’importance.

Le chantre et le diacre se retirèrent ; quant au pope, il se cacha dans le vestibule, sous la vache. Le moujik s’en aperçut et dit à son épouse : « Femme, va chez la popadia, tu lui diras qu’elle peut venir acheter la vache ; il y a longtemps qu’elle a envie de l’avoir, et maintenant je la lui céderais à bon marché. » En apprenant cette nouvelle, la popadia quitta aussitôt son lit, s’habilla et courut chez le paysan. « Eh bien ! Ivan, tu veux me vendre ta vache ? — Oui, matouchka. — Qu’est-ce que tu