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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/247

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CONTES SECRETS RUSSES

la tête dévorée par les loups, ils n’ont laissé que le tronc ; on l’enterre demain ! — Quel malheur pour cette pauvre famille ! Il faut, vieille, que nous allions dire adieu à la défunte avant qu’on l’enterre. Ces gens-là ont été bons pour nous ! Mon fils, attelle les chevaux, ta mère et moi nous allons nous rendre chez le copain… » Le jeune homme attela, les deux vieillards montèrent dans leur charrette et partirent. L’équipage approchait de la cour quand le maître de la maison, apercevant ses amis, court au devant d’eux. « Bonjour, copain, comment vas-tu ? Donnez-vous la peine d’entrer dans l’izba, chers visiteurs ! — Merci, copain ! » répondirent-ils tristement ; « ce n’est pas une visite que nous te faisons, nous sommes venus dire le dernier adieu à ta fille. Évidemment, il était écrit qu’il n’y aurait pas d’alliance entre nos deux familles. — Pourquoi donc, copain ? — Mais le malheur est entré dans ta maison, les loups ont dévoré la tête de ta fille ! — Quand ? Qui vous a dit cela ? — C’est mon fils, il a logé chez vous la nuit dernière, il a tout vu de ses yeux. — Ah ! par exemple, en voilà une ! Ainsi, c’était ton fils ? Il n’y a pas à dire, quoique ma fille soit encore vivante, c’est une affaire ratée. » Après quelques moments d’entretien on se sépara et, depuis lors, les deux paysans cessèrent de s’appeler copains.