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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/88

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CONTES SECRETS RUSSES

humbles proportions qu’il avait auparavant. Quand le jeune paysan se fut longuement amusé de la sorte, le sommeil s’empara de lui, mais, avant de s’endormir, il oublia de mettre l’anneau dans sa poche et le laissa sur sa poitrine. Un barine vint à passer en voiture avec sa femme. Apercevant non loin de la route un moujik endormi, sur la poitrine de qui brillait une bague, le gentilhomme fit arrêter et dit à son laquais : « Va prendre l’anneau de ce moujik et rapporte-le-moi. » Le domestique exécuta aussitôt l’ordre de son maître, puis l’équipage se remit en marche. Mais la beauté de l’anneau captiva l’attention du barine. « Regarde un peu, douchenka, comme cette bague est belle, » dit-il à sa femme ; « voyons si elle m’ira. » Et il se passa l’anneau au milieu du doigt : sur-le-champ son υιτ s’allongea, culbuta le cocher en bas de son siège, passa par-dessus l’attelage et s’étendit en avant de la voiture sur une longueur de sept verstes. À cette vue, la barinia consternée cria au laquais : « Retourne vite auprès du paysan, ramène-le ici ! » Le laquais courut éveiller le moujik et lui dit : « Va trouver mon maître, dépêche-toi ! » Pendant ce temps, le paysan cherchait son anneau : « Que le diable t’emporte ! Tu m’as pris mon anneau ? — Ne cherche pas après, » répliqua le laquais, rends-toi auprès de mon maître, c’est lui qui l’a ; ton anneau, mon ami, nous a attiré bien des embarras. » Le paysan ne fit qu’un saut jusqu’à la calèche. « Pardonne-moi, » commença le gentil-