Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/370

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comtesse de Pendennyss et lady Marianne, presque entièrement cachées par les arbrisseaux qui entouraient la maison, attendaient avec impatience le passage des troupes qu’annonçait le bruit qu’elles venaient d’entendre.

Leur voiture les attendait à quelque distance, et la pâleur et la résignation qui étaient empreintes sur les traits de la comtesse et de sa sœur ne prouvaient que trop le combat que se livraient dans leurs cœurs des devoirs opposés.

Des bataillons nombreux, des canons, des drapeaux, de superbes coursiers, se succédaient à la file, dans toute la pompe de la splendeur militaire, et le regard inquiet des deux sœurs avait en vain cherché l’objet de leur sollicitude. Il parut enfin ; il les aperçut, et bientôt Émilie se trouva dans les bras de son mari.

— C’est le sort d’un militaire, dit le comte en essuyant une larme à la dérobée ; j’espérais que nous allions jouir d’une longue paix, et voilà que les sanglantes folies d’un ambitieux nous forcent à reprendre les armes ; mais prenez courage, ma chère amie, espérons que cette campagne se terminera heureusement ; votre confiance ne se repose pas seulement sur les secours terrestres, et votre bonheur est indépendant du pouvoir de l’homme.

— Ah ! Pendennyss !… mon cher ami, dit Émilie en sanglotant et en appuyant sa tête contre la poitrine de son mari, mon amour, mes prières vous suivront : que ne puis-je m’attacher à vos pas et partager vos dangers !… Je ne vous dirai pas d’avoir soin de vos jours… je ne connais que trop les cruels devoirs d’un militaire ; mais pensez quelquefois à votre amie, qui ne saurait vivre sans vous, et puisse le ciel que j’invoque vous rendre bientôt à mon amour !

Voulant abréger des adieux trop pénibles, le comte pressa encore une fois son Émilie contre son cœur, embrassa tendrement Marianne, et s’élançant sur son cheval, il fut bientôt hors de vue.

Quelques jours après le départ de Pendennyss, Chatterton fut surpris de voir arriver inopinément la douairière et Catherine. Il les reçut avec le respect qu’il avait toujours témoigné à sa mère, et sa femme tâcha, par amour pour l’époux qu’elle adorait, de faire un accueil agréable à des parentes qu’elle ne pouvait estimer. Ce qui leur était arrivé ne fut pas long à raconter : lord et