Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/88

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

table jour : c’est à M. Denbigh à faire des excuses. Le colonel était un peu embarrassé, lorsque Jarvis, en qui le billet de cinq cents livres avait opéré une révolution complète, s’écria :

— Mais vous savez, ma mère que je l’ai accusé, c’est-à-dire soupçonné d’avoir été sur mes brisées en dansant avec miss Moseley ; maintenant que tout est expliqué, et qu’on m’a fait connaître ma méprise, puis-je mieux faire que d’avouer avec dignité que je me suis trompé ?

— Oh ! certainement, dit avec empressement le colonel qui vit le danger d’une rupture entre les deux familles ; la délicatesse, la justice, l’exigent impérieusement, Madame. Et tout en parlant, il eut l’air de faire tomber une lettre par accident.

— Est-ce de sir Edgar, colonel ? demanda Mrs Jarvis, comme il se baissait pour la ramasser.

— Oui, Madame, et il me prie de le rappeler à votre souvenir et à celui de toute votre famille.

Mrs Jarvis inclina la tête et poussa un profond soupir. Un observateur attentif eût pensé qu’il était causé par l’anxiété maternelle pour la réputation d’un fils chéri, mais pas du tout : il n’exprimait que le regret conjugal de l’entêtement obstiné de l’alderman, qui n’avait point voulu employer une partie de sa fortune à se faire appeler aussi sir Timothée.

Enfin, l’héritier de sir Edgar l’emporta, et le capitaine reçut la permission de faire… ce qui était déjà fait.

En quittant l’appartement de sa mère, après leur première discussion et avant que la cause fût soumise à la décision du colonel, il avait été trouver son père pour lui annoncer qu’il consentait à tout. Le vieux marchand connaissait trop bien le pouvoir de cinq cents livres pour douter de leur effet ; il avait déjà demandé sa voiture, et ils partirent de suite pour Moseley-Hall.

En y arrivant, le capitaine s’avança avec embarras vers celui qu’il avait injustement provoqué, et bégaya, en termes presque inintelligibles, l’apologie demandée. Dès ce moment on parut oublier cette sotte affaire : Jarvis fut reçu au château comme par le passé. Émilie cependant ne pouvait vaincre la répugnance qu’il lui inspirait, et ne parvenait pas toujours à la cacher.

Denbigh avait pris un livre au moment où Jarvis avait commencé ses excuses au baronnet et à sa fille, et discrètement il avait l’air d’être entièrement absorbé dans sa lecture. Le capitaine