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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/283

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toujours, excellent Arnolph. Faire des menaces à Duerckheim, c’est aussi inutile que de mettre de l’eau bénite dans notre vin du Rhin, et cependant ce sont des choses fort bonnes quand elles sont employées à propos ; mais celui qu’on ne saurait faire marcher de force doit être pris par la douceur, et le vin qui est bon par lui-même n’a pas besoin que l’Église lui donne de la saveur. Quant à ces vieilles querelles entre Limbourg d’un côté, le noble comte d’Hartenbourg et notre indigne cité de l’autre, il peut être facile de les ajuster, maintenant que le plus grand obstacle se trouve écarté. Ainsi donc je vous félicite du fond du cœur de votre mission, et je ne félicite pas moins la ville d’avoir à traiter avec une personne aussi habile et aussi raisonnable. Vous nous trouverez dans des dispositions pacifiques et prêts à faire la moitié des avances, car je ne crois pas qu’il y ait personne ici qui désire pousser les choses plus loin, et qui ne consente de grand cœur à un arrangement.

— Parbleu ! ce serait manquer de raison et de charité, dit le forgeron en élevant de nouveau la voix au milieu de son groupe. Il faut que nous donnions à ces bénédictins un exemple de modération, voisins ; et quant à moi, quoique je ne sois qu’un pauvre artisan qui gagne son pain à force de frapper sur son enclume, je suis de l’avis de mon bourgmestre, et je dis : Au nom de Dieu ! soyons raisonnables dans nos demandes, et contentons-nous d’aussi peu que possible.

Le prieur écouta avec sa patience ordinaire, et ses joues s’enflammèrent un instant ; mais cette émotion ne fut que passagère, et l’expression bienveillante de ses yeux bleus se fit seule remarquer au milieu de traits que les travaux du cloître et du cabinet avaient depuis longtemps dépouillés de toute couleur. — Vous savez, bourgeois de Duerckheim, répondit-il, qu’en renversant les autels de Limbourg, vous avez attaqué un double pouvoir : celui de l’Église, tel qu’il est établi et reconnu sur la terre, et celui de Dieu. Ma mission dans ce moment est de vous parler du premier. L’évêque de Worms est profondément irrité, et il n’a pas manqué de s’adresser directement à notre saint-père, à Rome. Indépendamment de ce saint appel, des messages ont été envoyés à l’électeur et à l’empereur, ainsi qu’à plusieurs des princes ecclésiastiques qui résident sur les bords du Rhin. C’est une redoutable réunion de forces pour qu’un baron montagnard et une