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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/33

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féodal de la plupart des montagnes voisines, aussi bien que de nombreux villages dans la plaine du Palatinat. Il semblait que le gardeur de vaches attendît l’arrivée de son compagnon ; nous pourrions peut-être même dire son ami, par la manière familière avec laquelle ils s’abordèrent. Gottlob se tenait près de la chaumière de sa mère, et lorsque les deux jeunes gens se rencontrèrent, ils se firent signe mutuellement, et avancèrent à pas rapides, laissant le village derrière eux.

Lorsqu’on quittait le hameau, la vallée s’agrandissait, et prenait cet aspect de fertilité et de culture que nous avons décrit au lecteur dans l’Introduction ; car ceux qui ont parcouru cette préface, nécessaire à notre ouvrage, reconnaîtront que les deux jeunes gens avec lesquels nous venons de leur faire faire connaissance étaient dans le bassin de la montagne qui contenait l’abbaye de Limbourg. Mais si trois siècles ont peu altéré le caractère de ces lieux, ils ont produit un changement bien grand dans les objets plus périssables.

Tandis que les jeunes gens marchaient rapidement, les premiers rayons de la lune touchaient le sommet des montagnes, et avant qu’ils eussent fait un mille, en suivant toujours la direction du sentier qui communiquait avec la vallée du Rhin, les toits et les tours de l’abbaye elle-même en furent éclairés. Les bâtiments du couvent étaient semblables, par leur nombre et leur confusion, au groupe de maisons que forme un village, tandis qu’un mur massif entourait tout le sommet de la montagne isolée. Cette demeure ressemblait à celle de ces princes ecclésiastiques du moyen-âge, qui portaient l’armure sous l’étole ; car en même temps que les tours et les vitraux coloriés, les croix et les ex-voto, annonçaient le caractère de cet établissement, des précautions attestaient que les saints pères plaçaient autant de confiance dans les moyens humains que dans les secours célestes pour la protection de ceux qui composaient la congrégation.

— Il y a une lune pour un moine comme pour un gardeur de vaches, il me semble, observa Gottlob en parlant à voix basse ; voilà la lumière qui éclaire la tour la plus élevée de l’abbaye, et elle brillera bientôt sur la tête pelée de chaque paresseux du couvent, qui est dehors, goûtant le vin nouveau en se mêlant des affaires de quelques bourgeois de Duerckheim

— Tu n’as pas beaucoup de respect pour les saints pères,