Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/373

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étaient ceux qui sont habituellement observés par l’église de Home, à l’occasion d’un exorcisme, ou d’une supplication particulière pour être délivré des signes mystérieux de la colère céleste. Le comte et Heinrich, comme il convenait à leur rang, marchaient hardiment en avant, car quelle que pût être l’étendue et la nature de leurs craintes, ils les cachaient avec autant de sagesse que de succès. Le digne bourgmestre éprouvait une admiration respectueuse pour la fermeté du noble, et celui-ci s’étonnait qu’un homme comme Heinrich, dont l’éducation avait été si peu soignée, fût capable de montrer une résolution qu’il croyait être le partage de la seule philosophie. Ils se dirigèrent vers la plaine élevée de l’Heidenmauer, par le chemin creux que nous avons déjà mentionné dans ces pages comme celui que suivit Ulrike en descendant à l’abbaye la nuit de l’assaut. Jusqu’à ce qu’ils eussent atteint le sommet, il ne se passa rien qui pût causer de nouvelles alarmes ; et comme les choristes augmentèrent la force de leurs chants, les chefs commencèrent à éprouver une vague espérance d’échapper à de nouvelles interruptions. À mesure que le temps s’écoulait, le comte respirait plus librement, et il s’imaginait déjà qu’il avait prouvé au peuple que l’Heidenmauer n’était pas un lieu plus dangereux qu’un autre dans le Palatinat.

— Vous avez souvent parcouru à cheval cette sauvage habitation du diable, noble et vaillant comte, dit Heinrich lorsqu’ils eurent atteint les limites de la plaine supérieure ; une personne si accoutumée à la voir ne peut pas être aisément troublée par les cris et les aboiements d’une même de chiens, quand ils auraient placé leur chenil sous le Teufelstein lui-même.

— Tu fais bien de dire souvent, bon Heinrich ; lorsque j’étais encore enfant, mon excellent père avait l’habitude d’amener ses coursiers sur cette hauteur, et j’avais souvent le plaisir d’être de la partie. Alors nous chassions fréquemment le cerf de dessous la forêt jusqu’à cette terre découverte.

Le comte s’arrêta, car un piétinement rapide, semblable à celui que produisent les pattes des chiens battant la terre, se faisait entendre au-dessus de leur tête, quoique la montagne fût toujours en apparence aussi tranquille qu’auparavant. En dépit de leur résolution, les deux chefs s’arrêtèrent subitement, et ceux qui marchaient derrière furent forcés de les imiter.