Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/9

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aigle. En apercevant Mayence le soir du second jour, nous discutâmes et nous comparâmes avec impartialité, du moins à notre avis, ce que nous venions de voir avec les scènes que nous nous rappelons si bien et avec tant d’attendrissement.

Je connaissais l’Hudson depuis mon enfance : c’est le grand passage de tous ceux qui voyagent de l’intérieur des États vers la mer ; et la nécessité m’avait fait voir de bonne heure ses détours, ses promontoires, ses îles, ses villes et ses villages. J’avais examiné attentivement jusqu’à ses ramifications les plus cachées, et il fut un temps où il n’y avait pas un point de vue sur ses rives ou un hameau qui n’eussent été visités par moi. Il y avait donc le vif souvenir d’une ancienne impression à opposer à l’influence d’objets encore visibles.

Suivant mon opinion, le Rhin, qui possède plus fréquemment que l’Hudson toute sorte de points de vue pendant un nombre de milles donnés, n’a rien de sa magnificence ; il manque de la variété, de la noble beauté et de la largeur du fleuve américain. Ce dernier, pendant la distance universellement reconnue pour réunir les plus belles vues du Rhin, est à la fois un fleuve large et étroit ; il a ses baies, ses passages rétrécis au milieu des prairies, ses gorges écumantes, et ses endroits les plus larges ressemblent aux lacs d’Italie ; ce que l’on peut dire de plus à l’avantage de son rival d’Europe, c’est que toutes ces beautés merveilleuses y sont faiblement rappelées. Dix degrés d’une latitude plus basse donnent des teintes plus riches, des transitions de lumière et d’ombre plus brillantes, des changements d’atmosphère plus avantageux, et servent à imprimer plus d’éclat aux beautés de notre climat occidental. Relativement aux îles, l’avantage est encore à l’Hudson ; celles du Rhin sont plus nombreuses, celles de notre fleuve ont plus d’étendue, sont mieux placées, et en général plus imposantes.

Lorsque la comparaison entre ces deux fleuves célèbres est poussée jusqu’aux accessoires qu’ils doivent à l’art, les résultats sont plus douteux. Les bâtiments des anciennes villes et des villages de l’Europe semblent groupés pour produire de l’effet, lorsqu’on les voit à une certaine distance, bien que leur sécurité soit le but principal de la manière dont ils sont construits, au lieu qu’il faut entrer dans les villages propres, spacieux et gais de l’Amérique pour pouvoir les apprécier. Dans l’ancien hémisphère,