Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/256

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Le brigadier Downright et moi nous demandâmes alors qu’il nous fût permis de défendre l’accusé, en vertu d’une très-ancienne loi de Leaphigh, comme ses plus proches parents, moi comme étant de la même espèce, et le brigadier, par adoption. Toutes les formes préliminaires ayant été observées, le procureur général allait détailler les preuves de l’accusation, quand Downright se leva, et dit que, pour épargner le temps de la cour, il admettait les faits, et qu’il avait dessein de baser uniquement la défense de l’accusé sur les lois et leur application. Il dit, qu’il présumait qu’à Leaphigh comme à Leaplow, les jurés étaient juges de la loi aussi bien que du fait ; et qu’il était prêt, ainsi que son confrère Goldencalf, à prouver que la loi était pour nous dans cette affaire. La cour nous donna acte de l’admission des faits, et les soumit aux juges comme prouvés par consentement. Cependant le président prit occasion de remarquer qu’il y avait deux cas à distinguer ; que dans le premier, les jurés étaient certainement juges de la loi, mais qu’ils ne l’étaient pas dans le second. Le baron Longbeard[1] protesta contre cette doctrine, et soutint que les jurés étaient juges de la loi dans le second cas, mais qu’ils ne l’étaient pas dans le premier. Après ce petit incident, le procureur général se leva, et prit la parole pour la couronne.

Je vis bientôt que nous avions affaire à un antagoniste ayant un vaste génie, et une tournure d’esprit philosophique. Il commença par tracer une esquisse vigoureuse et lucide de l’état du monde avant la subdivision de ses habitants en tribus et en nations, et quand ils étaient encore en chrysalide, c’est-à-dire dans la condition humaine. De là il descendit aux gradations régulières qui divisèrent les hommes en communautés, et les soumirent aux lois de la civilisation ou de ce qu’on appelle la société. Arrivé là, il dit un mot des différentes phases que les institutions des hommes avaient présentées, et descendit peu à peu jusqu’aux principes fondamentaux du traité social des Monikins. Après quelques observations générales qui naissent naturellement du sujet, il en vint à parler de cette partie des principes élémentaires de la société qui a rapport aux droits du souverain. Il les divisa en droits de la prérogative royale, droits de la personne du

  1. Longue-barbe.