Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/386

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compter que sur lui dans des circonstances où d’autres auraient senti la nécessité de ne compter que sur Dieu. Le mourant l’écouta avec attention, et ses paroles parurent faire une impression momentanée sur son esprit.

— Je ne veux pas mourir, Monsieur, dit-il tout à coup après une longue pause.

— C’est pourtant la destinée commune ; quand le moment arrive, notre devoir est de nous y préparer.

— Je ne suis pas un lâche, monsieur Effingham.

~ Dans un sens, je sais que vous ne l’êtes pas, car je vous ai vu à l’épreuve. J’espère que vous ne le serez dans aucun sens. Vous n’êtes pas à présent dans une situation où le courage puisse servir à quelque chose ; vous ne devez chercher votre appui qu’en Dieu.

— Je le sais, Monsieur ; — je m’efforce de le sentir ; mais je ne veux pas mourir.

— L’amour du Christ est sans bornes, dit John Effingham, profondément affecté à la vue d’une si profonde misère.

— Je le sais, — je l’espère, — je voudrais le croire. Avez-vous une mère, monsieur Effingham ?

— Elle est morte depuis longtemps.

— Une épouse ?

John Effingham respira péniblement ; on eût pu croire dans ce moment que c’était lui qui était à l’agonie.

— Non : je n’ai ni mère, ni frère, ni sœur, ni femme, ni enfant. Mes plus proches parents sont sur ce paquebot.

— Je suis bien peu de chose, mais, tel que je suis, je ferai faute à ma mère. Nous ne pouvons avoir qu’une mère, Monsieur.

— Si vous avez quelque commission ou quelque message pour la vôtre, monsieur Lundi, je m’en acquitterai avec beaucoup de plaisir.

— Je vous remercie, Monsieur ; je ne sache pas en avoir. Elle a ses idées sur la religion ; et — je crois que ce serait une consolation pour elle si j’avais une sépulture chrétienne.

— Tranquillisez-vous à cet égard ; tout ce que permet notre situation sera fait, je vous en réponds.

— À quoi cela servira-t-il, monsieur Effingham ? Je voudrais avoir bu moins et pensé davantage.

John Effingham n’avait rien à dire à une componction qui était si nécessaire, quoique si tardive.

— Je crains que nous ne pensions trop peu à ce moment lorsque nous avons la force et la santé, Monsieur.

— Il n’en est que plus nécessaire, monsieur Lundi, de tourner nos