les détails qu’on venait d’entendre, et l’on ne tira de lui que des protestations énergiques qui en attestèrent l’exactitude.
On peut à peine se figurer quelle réputation valut au comte de Llera cette petite supercherie. Être en état de répéter avec tant de précision et en produisant tant d’effet, un récit qu’on supposait être sorti de la propre bouche de Colomb, c’était un véritable titre de gloire. Pierre Martir, qui jouissait d’une réputation d’éloquence justement acquise, faisait en tous lieux les plus grands éloges de notre héros, et ses jeunes élèves suivaient son exemple avec toute l’ardeur imitatrice de la jeunesse. Telle était la puissance de la renommée acquise par le Génois, qu’elle se reflétait en partie sur quiconque passait pour avoir sa confiance ; et le fait que l’amiral avait jugé le comte de Llera digne d’être le dépositaire de ses sentiments, de ses opinions et, de tous les incidents de son voyage, faisait oublier mille folies réelles ou supposées de ce jeune seigneur. D’une autre part, comme on voyait souvent don Luis dans la compagnie de l’amiral, le monde était disposé à lui accorder des qualités dont, par suite de circonstances inexplicables, on ne s’était pas encore aperçu. Ce fut ainsi que Luis de Bobadilla retira quelque avantage aux yeux du public de la courageuse fermeté avec laquelle il s’était associé à cette grande entreprise, quoique rien n’eût égalé sa gloire s’il avait avoué hautement la part qu’il y avait prise. Jusqu’à quel point et de quelle manière cet avantage le servit auprès de Mercédès, c’est ce qu’on verra dans les pages suivantes.
CHAPITRE XXVIII.
e jour de la réception publique de Colomb à la cour avait été
une journée de sentiments tumultueux, et d’une joie sincère pour