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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 19, 1842.djvu/157

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OU LE TUEUR DE DAIMS.

quable qu’il lui avait valu le nom de Wah-ta !-Wah ; en un mot, c’était la fiancée de Chingachgook : elle avait réussi à endormir les soupçons de ceux qui l’avaient enlevée, et il lui était permis d’errer autour du camp.

Cette faveur était compatible avec la politique générale des hommes rouges, qui savaient bien qu’il eût été facile de suivre sa piste en cas de fuite. On se rappellera que les Iroquois ou Hurons, comme il conviendrait mieux de les nommer, ignoraient entièrement la présence de son amant dans le voisinage ; circonstance dont elle-même n’était pas instruite.

Il est difficile de dire laquelle des deux montra le plus de sang-froid en cette rencontre imprévue, de la Face-Pâle ou de la Peau-Rouge ; mais, quoique un peu surprise, Wah-ta !-Wah était la plus disposée à parler, et la plus prompte de beaucoup à prévoir les conséquences, aussi bien qu’à imaginer les moyens de les détourner. Pendant qu’elle était enfant, son père avait été souvent employé comme soldat par les autorités de la colonie, et pendant un séjour de plusieurs années près des forts, elle avait appris un peu d’anglais, qu’elle parlait à la manière abrégée des Indiens, mais couramment, et sans la répugnance ordinaire chez ceux de sa nation.

— Où aller ? répéta Wah-ta !-Wah en rendant le sourire de Hetty avec l’air doux et engageant qui lui était propre ; — guerriers méchants de ce côté, — bons guerriers loin d’ici.

— Quel est votre nom ? demanda Hetty avec la simplicité d’un enfant.

— Wah-ta !-Wah. — Pas Mingo, — bonne Delaware, — amie des Yankees. — Mingos très-cruels, — aiment les chevelures pour le sang. — Delawares les aiment pour l’honneur. — Par ici, — là pas d’yeux.

Wah-ta !-Wah conduisit alors sa compagne vers le lac, en descendant la rive de manière à mettre les arbres suspendus au-dessus, et les buissons, entre elles et tout curieux ; elle ne s’arrêta pas qu’elles ne fussent toutes deux assises côte à côte sur un tronc d’arbre tombé, dont l’une des extrémités était plongée dans l’eau.

— Pourquoi venir ? demanda la jeune Indienne avec empressement ; — d’où venir ?

Hetty lui raconta son histoire avec sa candeur et sa naïveté habituelles. Elle lui expliqua la situation de son père, et lui fit part du désir qu’elle avait de le servir et de le délivrer, si cela était possible.

— Pourquoi votre père venu au camp mingo la nuit ? demanda