Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/118

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

semblables, c’est plus qu’il ne faut pour la part d’un seul homme, à moins que ce soit un Turc où un Indou.

— Sans doute, Tom, sans doute. Le major fait toujours des sermons de morale aux jeunes gens, mais au bout du compte c’est un malin gaillard. Remarquez-vous comme il aime les routes qui se croisent à l’autre bout de cette vallée ? Or, si je faisais faire halte à ma compagnie deux fois dans le même endroit, vous jureriez tous qu’il y a en l’air quelque cotillon.

— Vous êtes bien connu dans le corps, répliqua le lieutenant d’un ton sentencieux.

— Votre penchant à la raillerie est incurable, Tom, dit Lawton. Mais, ajouta-t-il en penchant le corps du côté vers lequel ses yeux se dirigeaient, comme pour mieux distinguer les objets dans l’obscurité, quel est l’animal qui traverse la vallée sur notre droite ?

— C’est un homme, répondit Mason après avoir regardé avec attention l’objet suspect.

— À en juger par son dos, c’est un dromadaire, dit le capitaine. Puis quittant tout à coup le grand chemin, il s’écria : — Harvey Birch ! qu’on le saisisse mort ou vif.

Mason et quelques-uns des dragons qui marchaient les premiers furent les seuls qui comprirent ces paroles ; mais le cri fut entendu sur toute la ligne. Une douzaine d’entre eux, ayant le lieutenant à leur tête, suivirent l’impétueux Lawton, et leur rapidité menaçait celui qu’ils poursuivaient de voir bientôt la fin de cette course.

Birch avait prudemment gardé sa position sur le haut du rocher où Henry Wharton l’avait vu en passant, jusqu’à ce que le crépuscule eût commencé à couvrir d’obscurité tout ce qui l’environnait. Du haut de son élévation, il avait vu tous les événements de la journée à mesure qu’ils étaient arrivés. Il avait attendu le cœur palpitant, le départ des troupes de Dunwoodie, et il avait, non sans peine, réprimé son impatience jusqu’au moment où la nuit mettrait ses mouvements à l’abri de tout danger. Il n’était encore pourtant qu’au quart du chemin qu’il avait à faire pour regagner sa demeure, quand son oreille attentive distingua le bruit de la marche d’une troupe de cavalerie qui approchait. Cependant, se fiant sur l’obscurité qui augmentait, il résolut de continuer sa route, et il se flatta qu’en se courbant et en marchant rapidement il ne serait pas aperçu. Le capitaine Lawton avait été