Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 23, 1845.djvu/34

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toujours la livrée du roi. Après une longue consultation entre les parents inconsolables, il fut décidé que George Wetmore partirait pour Londres pour continuer ses recherches. Mais à cette époque l’argent était rare. Ces braves gens trouvaient bien moyen de vivre honorablement du produit de leur petite ferme, mais ils n’étaient pas riches en argent comptant. Tout ce qu’ils en possédaient était passé dans les recherches antérieures, et même une petite dette avait dû être contractée à cette occasion. Il ne restait donc d’autre alternative que d’emprunter en donnant la ferme pour hypothèque. Il en coûtait beaucoup, mais que ne ferait pas un père pour son enfant ? Un agent d’affaires, nommé Van Tassel, se montra tout disposé à avancer cinq cents dollars sur un bien qui en valait au moins trois mille. Cet homme faisait partie de cette classe odieuse d’usuriers de province qui s’abattent sur les malheureux comme d’avides oiseaux de proie pour en exprimer toute la substance, engeance encore plus détestable que leurs pareils des grandes villes, parce que leurs victimes sont dans une détresse réelle qu’un désir immodéré de s’enrichir tout d’un coup n’a pas amenée, et qu’en même temps leur ignorance et leur peu d’habitude des affaires les rend encore plus faciles à exploiter. On ne saurait croire avec quelle patience infatigable ces misérables attendent le moment propice pour faire ce qu’ils appellent un bon coup. Ce Van Tassel avait des motifs particuliers pour convoiter la petite ferme de mistress Wetmore, sans parler de sa valeur intrinsèque ; et pendant des années il se montra d’une douceur et d’une longanimité à toute épreuve. Il laissa s’accumuler les intérêts jusqu’à ce que la dette s’élevât à la somme totale de mille dollars. Pendant ce temps le père était allé en Angleterre ; à force de soins et de frais, il avait retrouvé le soldat, uniquement pour acquérir la certitude que Pierre connaissait parfaitement ses parents, et en attendant, il avait dépensé tout son argent.

Des années d’anxiété et de détresse suivirent, et le père succomba graduellement sous le poids de ses infortunes. Une fille unique, qui elle-même avait perdu son mari, le suivit de près au tombeau, léguant la petite Kitty à la pauvre veuve. C’était ainsi que Catherine Van Duzer, notre vieille hôtesse, était restée presque seule au déclin de la vie pour lutter contre la pauvreté. Cependant, peu de mois avant sa mort, George avait réussi à vendre quelques terres dépendant de la ferme, et avec le produit de la vente, il avait remboursé