Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/195

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— Je suis sorti avec mon père ; sûrement je ne pouvais être en meilleure compagnie.

— Est-ce à sa suggestion ou à la vôtre, Bob ? demanda Maud en secouant la tête.

— J’avoue que c’était un peu à la mienne. Il me semblait si irrégulier pour deux soldats de rester dans l’ignorance sur la position des ennemis, que je n’ai pu résister au désir de faire une petite sortie. Il faut que vous reconnaissiez, ma chère Maud, que nous agissions pour votre sûreté, pour celle de ma mère et de Beulah, de toutes trois enfin ; et vous devez être la dernière à nous blâmer.

Maud rougit à ces paroles votre sûreté, sur lesquelles Robert appuya ; mais un acte qu’elle trouvait rien moins que prudent ne put la faire sourire.

— Ce sont là de puissants motifs, je le sais, dit-elle après une pause, mais il me semble que vous ne deviez pas courir vers de tels dangers. Vous avez donc oublié combien la vie de notre père nous est précieuse, à ma mère, à Beulah, et même à moi, Bob ?

— Même à vous, Maud ! Et pourquoi pas autant à vous qu’à nous.

Maud pouvait bien parler à Beulah du défaut de parenté entre elle et la famille, mais elle n’aurait pu se commander assez à elle-même pour faire une allusion directe à ce sujet en présence de Robert Willoughby. Cependant cette pensée était rarement absente de son esprit ; l’amour qu’elle avait pour le capitaine et sa femme, pour Beulah et le petit Evert, arrivait à son cœur à travers un plus tendre sentiment qu’une simple affection de fille et de sœur. Au lieu de répondre à Robert, elle lui fit une autre question après qu’un instant de silence eut dissipé son embarras :

— Avez-vous vu quelque chose, après tout, pour compenser tant de risques ?

— Nous avons acquis la certitude que les sauvages avaient déserté leurs feux, et n’étaient entrés dans aucune cabane. Ou ils veulent nous tromper, ou ils ont en effet fait une retraite aussi soudaine et aussi inattendue que leur invasion ; nous ne savons à quoi nous en tenir. Mon père appréhende une trahison, cependant ; et quant à moi il me semble que l’arrivée et le départ peuvent être tout à fait accidentels. Les Indiens sont en mouvement, certainement, car il est connu que nos agents s’entendent avec eux ; mais ce n’est pas ainsi que nos Indiens inquiéteraient le