Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/233

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— Et cela, ils vous l’ont dit, afin que vous me le répétiez ?

— Nullement ; c’est ma propre manière de voir. Je me suis peu entretenu avec eux.

— Et maintenant, dit le capitaine, je présume que je puis m’informer de votre compagnon. Vous l’avez probablement reconnu ?

— J’en étais loin d’abord capitaine, quand la vérité a brillé tout à coup à mes yeux. Je n’aurais jamais reconnu le major sous cet habillement ; et je le suivais en me disant à moi-même : qui ce peut-il être ? Alors je remarquai qu’il avait votre démarche, et puis je me souvins de la dernière nuit et de l’étranger qui accompagnait le capitaine ; je me rappelai aussi qu’il occupait la chambre près de la bibliothèque, et quand j’en vins à examiner ses traits, je fus bien assuré que c’était le major.

Joël mentait hardiment dans ce récit : mais il se disait que personne n’était en mesure de le contredire.

— Maintenant que vous m’avez expliqué comment vous avez reconnu mon fils, Strides, ajouta le capitaine, je vous prierai de me faire connaître ce qu’il est devenu.

— Il est resté avec les sauvages. Venant de si loin pour s’emparer du père, ils n’auraient pas laissé la liberté au fils, qui arrivait tout droit se jeter dans l’antre du lion.

— Et comment les sauvages savent-ils que c’est mon fils ? L’ont-ils reconnu aussi à sa démarche ?

Joël se trouva pris à cette question, et rougit légèrement. Il vit qu’il s’était placé dans une position critique, et il connaissait suffisamment le capitaine pour savoir qu’il n’hésiterait pas à le punir si ses soupçons se trouvaient confirmés. Il n’ignorait pas qu’il méritait la potence, et Joyce était homme à l’exécuter à l’instant si son supérieur le lui ordonnait. Cette idée fit trembler le traître.

— Ah ! j’ai été un peu distrait au commencement de mon récit ; se hâta-t-il de dire ; sans cela, j’aurais mieux raconté comment les choses sont arrivées.

— Eh bien, pour ne pas être interrompus, nous irons dans ma chambre, et Joyce nous y suivra aussitôt qu’il aura congédié ses hommes.

En une minute ou deux, le capitaine et Joël étaient assis dans la bibliothèque. Joyce se tenait respectueusement debout, le vieux soldat ne se permettant jamais aucune familiarité avec son supérieur. Nous donnerons la substance du récit de Joël dans notre