Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/369

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atteint une auberge qui au confortable d’une civilisation grossière unissait la simplicité des frontières. Là on leur dit qu’ils n’avaient plus qu’une douzaine de milles à faire pour arriver au Rocher. Il fallut faire le reste du voyage à cheval. Une grande propriété déserte était entre le grand chemin et la vallée ; aucune route publique ne la traversait. Les sentiers abondaient, et le ruisseau fut trouvé sans difficulté. Il fut peut-être heureux que la Hutte ne se trouvât pas sur une route fréquentée, et en parcourant le sentier qui suivait les sinuosités du ruisseau, Willoughby vit qu’on y avait rarement marché dans l’intervalle de dix-neuf ans qui s’était écoulé depuis qu’il ne l’avait vu. L’évidence de ce fait augmenta quand ils remontèrent le ruisseau pour atteindre le moulin, où l’esprit de destruction, qui prévaut si tacitement dans les nouveaux pays, s’était mis à l’œuvre. Les bâtiments avaient été brûlés, probablement parce qu’ils se trouvaient au pouvoir de quelques vagabonds malfaisants. Quelques-unes des machines furent transportées ailleurs, car dans les établissements des frontières on considère l’abandon temporaire d’une propriété comme un abandon complet.

Ce fut un moment de peine et de plaisir pour Maud et pour Willoughby que celui où ils atteignirent les rochers et aperçurent l’ancien étang des Castors. Les bâtiments étaient debout, et le temps les avait à peine altérés. Les portes avaient été assurées, quand on quitta l’habitation en 1776, et la Hutte n’ayant pas de fenêtres extérieures par lesquelles on pût s’y introduire, elle était restée complètement intacte. La moitié des palissades étaient pourries, mais la maison elle-même avait résisté aux ravages du temps. On y avait mis le feu, mais les murs de pierre opposaient un obstacle invincible ; on avait jeté un tison sur le toit, mais le coup manqua et les lattes ne s’enflammèrent pas. La serrure de la porte intérieure n’avait pas été touchée, on l’ouvrait facilement, et nos voyageurs se trouvèrent dans la cour.

Quel moment que celui où Maud, maintenant habituée au luxe d’une maison anglaise, entra dans ce lieu chéri, témoin des premières émotions de sa jeunesse. De longues herbes avaient poussé dans la cour, elles furent bientôt arrachées, et l’on put facilement examiner la maison. La Hutte était exactement dans le même état où elle avait été laissée, sauf la poussière qui s’y était amassée. Maud était encore dans la fleur de la beauté, aimante et aussi