Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/62

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grand besoin. Quelques-uns de nos officiers qui ont assisté aux plus chaudes affaires de la dernière guerre, déclarent qu’en tenant compte de la marche, de la fusillade et de la distance, ils ne se souviennent pas d’en avoir vu de plus terrible. Notre perte, en outre, n’est pas insignifiante eu égard au nombre de troupes engagées. Nous pouvons compter environ trois cents hommes mis hors de combat.

Le capitaine resta pendant quelques instants muet et même pâle ; son esprit semblait calculer les formidables résultats d’un tel événement. Puis il pria son fils de lui faire un récit détaillé de toute l’affaire. Le major obéit, en commençant par un aperçu sur la situation générale du pays, et en terminant par une description fidèle du dernier engagement, autant du moins qu’il était possible à un homme dont la fierté militaire et les sentiments avaient été trop vivement blessés pour lui permettre une entière impartialité.

Les événements qui précédèrent la vive escarmouche qu’on est convenu d’appeler la bataille de Lexington, et les incidents de cette mémorable journée, sont trop connus de nos lecteurs habituels pour que nous ayons besoin de les rappeler. Le major expliqua clairement tous les détails militaires, rendit pleine justice à la persévérance et à l’audace des provinciaux ; c’est ainsi qu’il appelait ses ennemis, car, Américain lui-même, il ne voulait pas leur donner le nom d’Américains. Il chercha en outre à expliquer par des arguments plausibles la marche rétrograde, autant par un sentiment de piété filiale que par amour-propre ; car, à vrai dire, la mortification du vieux soldat était tellement évidente, que son fils en éprouvait une véritable douleur.

— Le résultat de tout ceci, ajouta le major quand son récit fut achevé, a été de provoquer dans tout le pays une terrible exaltation, et Dieu sait ce qui doit suivre.

— Et tu es accouru ici pour me faire part de tout cela, Robert, dit le père d’un ton affectueux. Je t’en sais bon gré, et je n’attendais pas moins de toi. Nous aurions pu passer ici tout un été sans avoir appris un mot de cet important événement.

— Peu après l’affaire, ou du moins aussitôt que nous pûmes en apprendre les effets sur les provinces, le général Gage m’envoya secrètement porter des dépêches au général Tryon. Celui-ci connaissait votre position, et comme j’avais aussi à vous communi-