forcé la barrière, et qu’elles arrivaient sur nous avec l’impétuosité d’un torrent.
- Wordsworth.
i nous étions restés cinq minutes de plus sur le lit principal
de la rivière, c’en était fait de nous. Pendant qu’assis nous regardions
la force effrayante du courant autant que le permettait la
faible lueur de cette sombre nuit, je vis le sleigh de Guert Ten
Eyck passer en tourbillonnant devant nous ; celui d’Herman
Mordaunt suivit, les pauvres bêtes s’épuisant en efforts inutiles
pour secouer leur harnais et recouvrer leur liberté, afin de pouvoir
se sauver à la nage ; haletantes, elles étaient presque ensevelies
dans le courant, où les yeux d’Anneke ne pouvaient les
découvrir, quoiqu’elle entendît leur respiration pénible ; elle
n’avait pas reconnu davantage le sleigh de son père. Un instant
après, un de ces cris perçants, que le cheval à l’agonie fait
entendre souvent, retentit douloureusement jusqu’à moi. Je n’en
parlai pas à la pauvre fille, sachant bien que son amour pour son
père était le grand mobile qui l’excitait à des efforts surnaturels,
et ne voulant pas réveiller des alarmes qui, pour le moment,
étaient assoupies.
Deux ou trois minutes de repos étaient tout ce que les circonstances nous permettaient de prendre. Il était évident qu’alors tout était en mouvement sur la rivière, le monticule de glace sur lequel nous étions assis, aussi bien que les glaçons détachés qui,