Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/335

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ni les clameurs des Indgiens, ni le trouble qui régnait parmi nous. Les Indgiens ne paraissant pas encore disposés à s’approcher davantage, nous eûmes le loisir de conférer entre nous. M. Warren nous dit qu’ayant vu les hommes déguisés passer devant le presbytère, il les avait suivis, afin d’agir comme médiateur entre nous et eux.

— La destruction du dais devait vous avoir averti que les choses en étaient venues à l’extrême, observa ma grand’mère.

Mais M. Warren n’avait pas entendu parler de cette affaire, tant elle avait été conduite avec mystère. Il en exprima vivement sa surprise ; toutefois ses regrets me parurent assez froids. Il n’était pas homme à tolérer l’illégalité et la violence, et moins encore le vice particulier aux Américains, l’envie ; mais, d’un autre côté, il n’était pas homme à regarder avec faveur de vaines distinctions, surtout lorsqu’elles étaient établies dans la maison du Seigneur. Il ne se passa qu’un très-court intervalle pendant lequel les Indgiens demeurèrent en repos. Il devint bientôt évident qu’ils ne voulaient pas rester tranquilles spectateurs de ce qui se passait sous le portique, mais que leur intention était d’agir de manière ou d’autre. Se formant en une ligne qui rappelait bien plutôt la milice de notre grande république que la régularité sévère des guerriers de l’ouest, ils s’avancèrent en battant des pieds, comme s’ils voulaient nous épouvanter par le bruit de leur marche. Nos arrangements furent bientôt faits, et chacun se disposa de son mieux. Les dames, dirigées par ma grand’mère, conservèrent leurs siéges près de la porte ; les hommes de la maison étaient debout et immobiles, et pas un Indien ne bougeait. Quant à Susquesus il avait trop vécu pour se laisser aller aux surprises et aux émotions, et les hommes de la prairie semblaient diriger toute leur conduite sur la sienne. Tant qu’il demeura immobile, ils paraissaient disposés à l’être comme lui.

La distance entre l’arbre et le portique n’avait pas plus de cent pas, et il ne fallait pas grand temps pour la franchir. Je remarquai cependant que, contrairement aux lois de l’attraction, plus les Indgiens s’approchaient du but, plus leur mouvement se ralentissait. Leur ligne avait aussi perdu sa forme, décrivant alors plusieurs courbes, quoique le piétinement devînt plus bruyant, comme s’ils voulaient se donner du courage en faisant du bruit. Quand