faisait beau temps pour cette région, mais on remarquait cependant cette lumière capricieuse et changeante des latitudes élevées.
Il y avait du brouillard dans certains endroits, et au sud on apercevait quelques tourbillons de neige, quoique l’Océan au nord du groupe d’îles où l’on se trouvait, étincelât de l’éclat d’un soleil brillant. C’était le caractère mixte de cette vue qui lui donnait quelque chose de spécial, tandis que sa grandeur, sa sublimité, et même sa beauté, consistaient dans son étendue immense, ses montagnes de glaces flottantes reflétant la vive lumière du soleil, et l’été mêlé à la nature polaire.
— C’est un endroit remarquable, je ne puis le nier, dit Dagget, mais je ne puis dire que j’aime beaucoup les paysages, à moins qu’ils ne me donnent l’espoir d’un gain quelconque.
— Servez Dieu et révérez son saint nom, dit Stimson, et vous aimerez tous les endroits ; j’ai été au Vineyard, et je n’ai point pensé à l’endroit où je me trouvais, dès que mon cœur était pur.
— Il faut qu’un pauvre homme travaille, dit Dagget en reportant ses regards des plus brillantes montagnes de glace sur le rivage rocailleux qui était fréquenté par des milliers de veaux marins.
Dagget ne songeait qu’aux profits qu’il espérait tirer du voyage, tandis que Roswell songeait à Oyster-Pond et à Marie. Il la voyait toujours, simple de cœur, avec sa modestie et sa beauté de jeune fille. Il la voyait toujours pieuse ; car il est étrange de dire que Gardiner estimait encore plus sa maîtresse à cause de cette même foi qu’il ne partageait point lui-même. Il n’était pas irréligieux par système, mais sceptique. Quant à Marie, il trouvait juste qu’elle crût ce qu’on lui avait enseigné avec tant de persévérance ; car il n’admirait point l’esprit d’examen chez les femmes qui aiment les nouveautés et les paradoxes. Si Marie avait été moins pieuse, qu’elle eût moins cru en Jésus-Christ fils de Dieu, ce jeune homme sceptique l’aurait moins aimée.
Après une heure passée sur cette cime toute nue, un changement de temps eut lieu tout à coup et décida nos trois aventuriers à descendre de la montagne. Déjà l’on n’apercevait plus le volcan, mais une nuée de neige passa au-dessus de la montagne,