Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/101

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cela à une époque qui ne devait pas être très-éloignée. Si aucune saison n’était à l’abri des ouragans, c’était, surtout pendant les mois d’hiver que les tempêtes devaient éclater avec le plus de violence sous cette latitude. Or, nos deux marins n’avaient pas encore été à même d’apprécier par eux-mêmes l’influence de l’hiver, mais ils avaient vu souvent, à peu de distance, à la suite de simples bourrasques, les vagues s’élever de plusieurs pieds en moins d’une heure. Si la mer venait jamais à s’élancer sur le Récif, si les flots amoncelés en balayaient la surface, il était fort à craindre que la pauvre pinasse ne fût emportée, avant même d’être entièrement terminée, ce qui demandait au moins six à huit mois, à moins qu’on ne pût la placer dans un lieu à l’abri de ces inondations. C’était précisément l’avantage que présentait la pointe occidentale, où l’embarcation serait sous le vent de l’île. En même temps le roc avait à cet endroit trois ou quatre pieds d’élévation de plus que partout ailleurs ; et l’emplacement projeté était assez près de la mer pour que la mise à l’eau pût s’effectuer sans peine. Aussitôt, le radeau fut mis en réquisition, et la carcasse entière, avec quelques-unes des planches nécessaires pour commencer l’ouvrage, fut portée à la pointe.

Avant de placer la quille de la pinasse, Marc la nomma la Neshamony, du nom d’une crique située presque en face du Rancocus, autre baie de la Delaware, qui avait donné son nom au bâtiment, d’après cette circonstance que l’Ami Abraham White était né sur ses bords. Il y avait une grande mesure préliminaire à prendre ; c’était de trouver les moyens de travailler malgré l’ardeur du soleil. Ce fut encore à l’aide du radeau qu’on put commencer les dispositions nécessaires pour mener à bonne fin cette grande entreprise. Une grande voile de rechange fut tirée de la soute et mise sur le radeau avec une provision de cordages ; des mâts furent coupés à la longueur convenable, puis jetés à l’eau pour être remorqués à la suite, et Bob conduisit assez aisément le tout à bon port.

Deux heures le matin, deux heures après le coucher du soleil, c’était tout le temps que les deux constructeurs, malgré tout