accomplit. Même dans cette occasion solennelle, quand un être humain, une femme, allait subir un jugement capital, on ne s’écarta pas de la simplicité dans laquelle on laisse le piédestal de la raison, en opposition ouverte avec le prestige dont la loi jadis entourait sa puissance. Il reste à examiner si la nature humaine n’a pas été exaltée trop haut par les nouveaux arrangements, comme elle avait été ravalée trop bas par les anciens. Il y a un milieu dans la vérité ; et il est à craindre qu’en mettant de côté les inutiles ornements d’une pure parade, on ait aussi rejeté ceux que les convenances demandent.
Un quart des assistants réunis dans le palais du comté de Dukes était des femmes. La curiosité si naturelle, dit-on, à ce sexe, était accrue par les circonstances particulières de la cause : une femme avait été assassinée, et c’était une femme qu’on accusait d’avoir commis ce crime. On disait, toutefois, qu’une grande partie de ces femmes avait été convoquée comme témoins.
Enfin, un silence général d’attente succéda à ce brouhaha de la foule entrant et cherchant des sièges, et les yeux des spectateurs étaient généralement tournés vers la porte, afin d’entrevoir le principal personnage de la scène qui s’apprêtait. Nous ne savons pourquoi le spectacle du malheur des autres a un si grand charme pour la plupart des hommes. La nature nous a donné la sympathie, la compassion, et un désir de soulager l’infortune ; et pourtant nous aimons presque tous à regarder le malheur comme un pur spectacle, quand nous n’avons ni le désir ni le pouvoir d’être autre chose que d’inutiles spectateurs. Des milliers de gens s’assemblent pour voir pendre un homme, quand tous savent que la loi a une étreinte trop dure pour lâcher sa proie, et qu’à ce moment suprême il n’y a pas place pour les sentiments de la pitié. Mais les choses vont ainsi ; et plus d’une femme, ce jour-là, qui aurait volontiers soulagé toute détresse qu’elles auraient eu le pouvoir de diminuer, étaient assises là, observatrices curieuses et intéressées de tout ce qui se passait, pour remarquer les agitations de la physionomie, les angoisses du fond de l’âme, s’il y en avait, ou les rayons de l’espérance qui pouvaient, par intervalles, éclairer les sombres tortures du désespoir.