tère dont ils devraient être revêtus ; je vois que la justice, loin d’être aveugle seulement à cause de son impartialité, est aussi aveugle par son ignorance. Pourquoi me trouve-t-on coupable de ce crime ? Sur quelles preuves, ou même sur quelle probabilité ? Toute la preuve roule sur ce qui concerne la pièce d’or. Mistress Burton a affirmé que mistress Goodwin elle-même était convenue que je lui avais donné cette pièce ; précisément ce que je dis au coroner, et ce qui ne fut pas cru alors, à ce que je vis, car mon malheur a été d’être jugée par des personnes qui ne me connaissaient pas. Ces messieurs se demanderont-ils à eux-mêmes pourquoi j’ai commis le crime dont ils m’ont trouvée coupable ? Ce ne pouvait être pour l’argent, vu que j’en ai, à moi, plus qu’il ne m’en faut, plus, peut-être, qu’il n’est bon pour moi d’en posséder.
— Pourquoi ces faits n’ont-ils pas été exposés au jury à temps et dans les formes voulues, s’ils sont vrais ? demanda le juge avec bonté. Ils sont très-importants, et auraient influencé sur le verdict.
Les jurés n’étaient plus en fonctions, mais aucun d’eux n’avait quitté son banc. Un ou deux se levèrent alors, et des regards de doute et d’indécision errèrent sur leurs physionomies. Ils avaient été influencés par un ami de Williams, son confident politique, qui avait amené les indécis à son opinion. Nous ne voulons pas dire que cet homme se parjura, ou qu’il eut lui-même conscience de l’étendue du mal qu’il faisait, mais son esprit avait été perverti par le conte envenimé mis en circulation, et il avait jugé la cause sous l’influence des rumeurs populaires. C’était un cas où le doute était permis, tout le monde en conviendra ; mais au lieu de faire profiter l’accusée du bénéfice de ce doute, comme il y était tenu par la loi et la raison, il s’était laissé guider par des influences extérieures, puis avait donné aux autres cette direction, si bien que par la simple force du nombre, les jurés qui flottaient encore furent entraînés dans un coin et ne tardèrent pas à capituler. De plus, il y a un misérable plaisir dans l’esprit de certains jurés à se mettre en contradiction avec le résumé du juge. C’est là une espèce d’indépendance agréable à